Alpinismes.free.fr - - - - - - Texte et illustrations Yves Saliba (tous droits réservés) . Dernière mise à jour le 08/08/2013 à 11:03
Concernant le piolet, il est 2 idées fondamentales à retenir :
-le piolet est essentiellement destiné à
permettre, par l'exécution de la "position d'arrêt"
, de stabiliser et freiner une glissade.
-le piolet est
contondant : mal manipulé, il peut blesser
Histoire
Initialement les montagnards (paysans, bergers et premiers
excursionnistes) ont utilisé un bâton droit et
éventuellement ferré.
Les premiers explorateurs de
glaciers ont utilisé des haches pour tailler des marches dans
la glaces.
Différents compromis entre bâton et haches
ont été forgés. La forme du piolet en est
issue.
Les premier piolets avaient un manche très long
(hauteur d'homme) et le piolet moderne fait à peu près
1/3 de la hauteur de son utilisateur.
Si la technologie a évolué
(manches en alliage léger), le principe du piolet utilisé
en randonnée reste identique depuis près d'un siècle.
(les imaginations se sont plus lâchées pour les piolets
utilisés en cascade de glace)
Symbole et mythes
Le piolet constitue avec la corde le
couple mythique symbole de l'alpinisme. Le geste d'alpiniste très
certainement le plus ancré dans l'imagerie populaire est celui
du "planté du piolet traction" ce qui n'est pas sans
poser quelques problèmes pédagogiques !
Les
alpinistes donnent quelquefois à leur piolet des petits noms
affectueux comme "piochon", "engin", "bête"...
Anatomie
Un piolet comporte un manche de longueur 50 à
80cm environ
Une tête portant (ou constituée de) 1
lame (longue) et 1 panne (partie courte et arrondie)
Une pique à
l'autre extrémité du manche
La lame est quelquefois appelé Pic mais nous éviterons
cette appellation qui porte à confusion avec la pique.
La
tête comporte généralement un trou appelé
oeil. La partie du manche située près de la pique est
nommé douille à cause de la douille qui renforçait
les manches bois à cet endroit.
La panne est quelquefois
appelée pioche.
La partie normalement de forme étroite
qui relie la panne à la tête est appelée le "col
de la panne".
Parmi les accessoires nous citerons :
-les embouts de protection
qui devraient être placés sur les 3 extrémités
pour réduire la dangerosité du piolet quand il n'est
pas utilisé.
-la dragonne ou la longe que certains
utilisent pour éviter de perdre le piolet ou pour renforcer
leur prise.
Catégories
Actuellement nous pouvons distinguer 2
usages assez différent du piolet:
-l'utilisation
universelle
-l'utilisation spécialisée "traction"
ou "cascade"
La "cascade" se réfère à une activité d'escalade sur glace (principalement cascade gelées et grandes faces gelées) qui utilise le piolet pour se tracter. (c'est une technique de progression, non d'assurage). Des piolets perfectionnés ont été développé pour être plus performants pour cet usage et en deviennent quelquefois inutilisables pour l'usage en "position d'arrêt".
Ces piolets particuliers dits "piolet traction" ou "piolet
cascade" ou, abusivement "piolet technique" et leur
utilisation seront traités dans le chapitre "Escalade sur
glace".
Par contre, dans ce document-ci nous ne traiterons
que du piolet "classique" ou "universel" et de
son mode d'emploi
Mode d'emploi du piolet
La technique de la "position d'arrêt"
Cette
technique s'utilise pour freiner, contrôler et si possible
arrêter une glissade intempestive sur une pente de neige, glace
(mais aussi quelque fois sur herbe ou terre). Il s'agit d'une
technique destinée à sauver une vie menacée (la
sienne ou celle de sa cordée). Lorsqu'on est amené à
exécuter la position d'arrêt, on le fait dans des
conditions d'urgence et de "pression" énormes, il
est donc essentiel d'avoir bien assimilé la technique, de
s'être entrainé, d'avoir répété les
gestes pour qu'ils soient quasi-instinctifs "au cas où".
(Pour clarifier l'explication nous supposons que nous ne sommes pas face à la pente mais en traversée. Nous avons donc un coté du corps vers l'amont, l'autre vers l'aval).
Position
Le piolet est pris à 2
mains.
-La main amont tient la tête du piolet, pouce sous le
col de la panne, les 4 autres doigts en crochet sur le dessus de la
tête et de la lame.
-La main aval tient le manche du piolet
près de la pique.
Le piolet est tenu le manche formant une
diagonale devant le torse :
-la main aval près de la
hanche aval;
-la main amont au-dessus de l'épaule amont et
à hauteur du cou. La main amont positionne le piolet pour que
la lame soit dirigée droit en face.
Le corps est couché
face au le sol, dos au ciel. On est donc en quelque sorte couché
sur le piolet de manière à exercer tout son poids sur
la lame pour qu'elle s'enfonce dans le sol.
Il y a 2 cas :
-sans
crampons, les chaussures peuvent contribuer fortement au freinage. En
prenant des carres ou en mordant avec la pointe avant.
-avec
crampons, il est impératif d'éviter que ceux-ci ne
touchent le sol car cela entrainerait un blocage brutale et un effet
de catapultage. Les pieds doivent donc être levés
(genoux fléchis)
Le réflexe inné étant
d'utiliser ses pieds pour se freiner, le catapultage par les crampons
étant un danger considérable, il faut donc s'entrainer
à LEVER les pieds (quitte les poser si on prend conscience que
l'on a pas les crampons aux pieds)
Fonctionnement
Corps
: Pour protéger les parties sensibles du corps et avoir
plus d'efficacité d'ancrage, le corps ne devrait pas être
face au sol mais légèrement sur le coté
amont.
Les jambes ne sont donc pas toutes les deux dans la
même position.
Sans crampons, le pieds peuvent
contribuer grandement au freinage.
Avec crampons il ne faut pas y
compter mais si on a mis les crampons à bon escient on est sur
neige dure et le piolet est alors très efficace.
La main
amont positionne la panne dans le creux entre l'oreille et
l'épaule. Le bras amont est fléchis.
Quand la lame
du piolet commence à la bourrer la neige, toute la force du
freinage est encaissée par le bras amont qui aura tendance
à se tendre. C'est ce qui permet au bras amont d'encaisser les
chocs (violents). Mais il ne faut pas le laisser se tendre car alors
:
-on ne peux plus exercer de "poids" sur le piolet pour
l'ancrer.
-en cas de choc, on ne peux plus amortir et on risque de
lâcher le piolet définitivement.
Il est donc
préférable d'alléger l'ancrage, ramener le
piolet main amont près de l'épaule et là
seulement re-exercer son poids sur le piolet pour l'ancrer.
Toute
ceci se passe en quelques secondes ou dixièmes de secondes,
bousculé, cogné par les aspérités du sol.
La main amont a aussi pour rôle de maintenir la lame
perpendiculaire au sol en contrôlant la rotation du piolet
autour de l'axe du manche.
La main aval a elle comme
rôle :
-de maintenir la perpendicularité de la lame
dans le sens vertical. Grâce à la longueur du manche,
c'est facile.
-d'empêcher la pique de se planter dans le
sol
-et de l'empêcher de se planter dans le ventre, la
hanche etc...!
Le passage en position d'arrêt
Sauf à
l'exercice, on ne "démarre" pas en position
d'arrêt.
On marche tranquillement ou anxieusement sur une
pente glissante et puis tout à coup, un de nos pieds glisse ou
trébuche ou bien, on se fait secouer par la corde car le
compagnon de cordée vient de chuter en "oubliant" de
le signaler !
C'est surprenant, violent.
L'essentiel de nos
chances de sauver nos vies se joue dans les premières
fractions de seconde.
-tenir fermement le piolet,
-l'agripper
avec les 2 mains en vue de la position d'arrêt ("porté
à 2 mains"),
-se jeter au sol plutôt que d'y
être jeter et commencer à le labourer avec toute son
énergie. (en levant les pieds si crampons !)
Ensuite s'écouleront quelques secondes (d'une durée
terriblement longue) où il faudra se battre -calmement- et
férocement, ne pas lâcher, ne pas exiger non plus un
arrêt immédiat -qui est impossible-, ne pas chercher à
"planter le piolet", labourer simplement et ...
tenir.
Voilà qui fait frémir, mais désolé,
ce n'est pas un "film", c'est réel.
Avec une
bonne préparation "Yes, we can" comme on dit chez
nos amis.
Être "toujours prêt"
Vous l'aurez
compris, pour que le passage en position d'arrêt puisse se
faire le mieux possible il importe qu'on tienne le piolet de manière
à ce que ce passage soit le plus direct, qu'il demande le
moins de manipulation ou de réflexion.
Il faut donc dans la
mesure du possible tenir la tête du piolet avec la main amont,
pouce sous le col de la panne, 4 doigts sur la lame : c'est ce que je
nomme la tenue en "lame-externe" (d'autres termes sont
envisageable lame-coté-auriculaire, lame-poignard...)
C'est
le cas notamment avec la tenue du piolet en canne qui est une
situation très courante (90% des utilisations).
Ainsi, en
cas de chute, il ne reste qu'à attraper le manche avec la
deuxième main avant de se placer en "position
d'arrêt".
Souvent même,on arrive à
enrayer le début de chute en basculant simplement le
piolet-canne en piolet-ancre.
Vous remarquerez que les positions Canne dorsale, Canne latérale
et bien sûr Porté à 2 mains et Ancre sont
immédiatement convertibles en position d'arrêt.
Le
"porté à 1 main" aussi, mais on tient le
piolet par le manche dans la main aval -en sachant précisément
comment est tourné la tête-. En cas de chute on
attrape la tête avec la main amont et la main aval est glissée
vers la pique.
Seules exceptions : la canne-frontale et l'appui
frontal ainsi que la tenue pour l'appui-ramasse. Nous y reviendrons.
L'apprentissage
L'importance et la difficulté de
la technique d'arrêt avec un piolet justifie de s'y entrainer
sérieusement : cela nécessite des exercice méthodiques
et en conditions propices (en sécurité) : une journée
d'exercices intensifs est d'une grande efficacité. Voir
chapitre "Ecole de neige"
-----------------
Autres
techniques
Ancre
Porté à 2
mains
Tenir le piolet comme pour la position d'arrêt,
mais rester debout ! La main amont tient la tête du piolet; la
main aval tient le manche près de la pique.
Porté
à 1 main
Tenir le piolet par son centre de gravité,
dans la main aval. La lame du piolet est orientée pour être
écartée du corps (au cas où on trébucherait).
Si besoin est, on retrouve immédiatement la position d'arrêt
en attrapant la tête dans la main amont.
Appui
Pieu
intégral
Pieu arrêt
Rampe
A
mon avis, technique mineure, dont on peut se passer et à
n'utiliser que si on n'a pas ne problème de sécurité
Traction
:
Cette technique spectaculaire,un dans chaque main est
"mythique". C'est ce à quoi pense un novice quand il
pense "piolet".
Elle est très adaptée à
des parois très raides et avec 2 piolets, par contre c'est une
erreur pour des pentes moins raides ou quand on dispose de ses deux
mains pour un seul piolet
Canne
La main amont tient le piolet, pouce sous le col de la panne,
paume sur la lame, doigts sous la lame. La lame est tournée
vers l'amont, donc écartée du corps, à la
perpendiculaire du bras.
En cas de chute, la main amont est déjà
en place pour un Appui. Dans bien des cas, la glissade sera
enrayée dès le départ en inclinant simplement le
piolet vers l'amont pour que la lame vienne se planter dans le
sol.
Il suffit d'attraper le manche avec la main aval pour se
mettre en position d'arrêt.
Quand on change de côté
de marche, changer le piolet de main. Marcher de façon
symétrique (pied aval + piolet, puis pied amont...), c'est le
plus stable.
Remarque
:
On voit couramment utilisée
la technique inverse, qui consiste à poser la main sur la
panne comme si c'était un repose-main*. C'est une erreur aux
conséquences dramatiques. Je déconseille formellement
cette méthode pour les raisons suivantes :
C'est inefficace : la lame n'est pas en position pour enrayer la glissade dès le départ. (se ramener en position d'arrêt ne peut se faire qu'en lâchant le piolet pour le retourner : c'est long et périlleux.)
C'est dangereux : la lame se trouve en permanence tournée vers le corps (jambes). En outre, en cas de chute, le réflexe naturel étant de poser les paumes sur le sol, on risque de tourner la lame du piolet vers sa poitrine.
*
La panne n'est là que pour tailler des marches
dans la glace.
*Cette position se nomme "piolet-panne"
et est adapté à une progression frontale qu'il
vaut mieux éviter en général.
voir
Chapitre "Le sens du piolet"
Usage de la panne
Et à
quoi sert donc la panne du piolet ?
Tailler des marches
Elle
est faite essentiellement pour permettre de tailler des marches dans
la glace ou la neige dure. Cet usage permet de passer en relative
sécurité un court passage de glace lorsqu'on n'a pas de
crampons ou même à améliorer la sécurité
pour un second qui ne maitrise pas bien ses crampons.
Ne doit pas se faire dans l'idée de "piocher"
(creuser un trou) mais de "sarcler" (gratter) : la panne
racle, laboure le sol pour y tailler un sillon. On refait le geste
jusqu'à obtenir un sillon suffisant pour y caler la chaussure.
Caler la main
Le col de la panne est indispensable pour
caler la main dans les techniques de l'ancre ou de la position
d'arrêt. Avec un marteau piolet le col de la "tête
de frappe" peut convenir. Avec des piolets trop spécialisés
"cascade de glace", l'absence de panne rend très
incertaine l'utilisation de ces outils en ancre ou charrue.
Poser la main : à éviter
La panne constitue
une surface plane, arrondie, fort attirante pour y poser la paume de
la main....c'est tentant, n'est-ce pas?
De la tentation à
la règle certain ne font qu'un pas et c'est ainsi que la
grande majorité des alpinistes utilisent leur piolets en canne
en posant la paume sur la panne, lame entre le pouce et l'index. (il
y a d'autres motifs aussi confus, voir "Le sens du piolet
canne")
Au risque de me répéter, en voici 2
dangers :
-cela retarde et rend aléatoire le passage en
position d'arrêt
-cela augmente le risque de se blesser avec
la lame
La planter : NON (voir Chapitre "Le sens du piolet")
La
panne n'est pas un organe d'ancrage, ni une alternative à la
lame. Certains le croient, certains l'enseignent (en prétextant
que ce serait adapté à la neige molle) pourtant :
-la
panne est en général petite, son ancrage éventuel
est très faible . Si la neige est molle, il faut garder le
piolet en position d'arrêt (il n'y a qu'une !) et simplement
mettre le manche en travers pour rajouter le raclage avec le manche
au labourage de la lame.
-tenir le piolet ainsi revient à
diriger la lame vers son cou ce qui est très dangereux
-se
mettre dans l'idée que selon la texture de la neige il
faudrait choisir une manière de faire ou l'autre peut faire
perdre quelques fractions de seconde et à cause de cela, la
vie !
Ramasse
Technique fondamentale
qui fait l'objet du chapitre "La ramasse"
Que faire du piolet quand on ne s'en sert
pas
Canne, portés : avec une seule
main soit utiliser le piolet en canne, soit porté à 1
main c'est à dire dans la main aval, au niveau du centre de
gravité du piolet (pour mieux le maitriser). Lame orientée
vers l'extérieur, à l'écart du corps afin de
réduire le risque de se faire "hara-kiri" si on
trébuche.
Piolet fixé sur le sac : Les sacs d'alpinismes sont
normalement pourvus d'anneaux et sangles destinés à
fixer un ou des piolets. Leur utilisation n'est pas évidente
et on voit trop souvent des erreurs en ce domaine. Mode d'emploi du
dispositif classique (anneau de sangle cousu au bas du sac):
-enfiler
le la pique puis le manche du piolet dans cet anneau du haut vers le
bas (et pas l'inverse !) : le piolet se retrouve suspendu, tête
en haut pique vers le bas.
-tourner le piolet pour que la lame
soit vers dirigée vers le centre et non vers l'extérieur
(pour qu'elle risque moins d'accrocher quelque au passage)
-basculer
le piolet : la tête se retrouve emprisonnée dans cet
anneau de sangle, la pique vers le haut.
-fixer alors le manche du
piolet à l'aide de la sangle,élastique ou "Velcro"
qui est placé là (ou avec les sangles du sac si
nécessaire).
Munir la pique et la lame d'embouts de
protection : ces pointes sont de véritables armes qui peuvent
éventrer, crever un oeil malgré vous. Très
important en excursion collective.
Piolet à la bretelle Très pratique pour se libérer les mains ponctuellement (par exemple pour un pas d'escalade). Doit être l'exception car présente un danger : en cas du chute, la tête du piolet peut venir frapper la nuque, endommager le cervelet : paralysie ou mort)
Piolet suspendu par sa tête Pour se libérer les mains ponctuellement, on peut préférer accrocher le piolet par son oeil à un mousqueton, le piolet se retrouve pendu le long de la jambe, sa tête à hauteur de la ceinture. Il faut avoir conscience du danger que cela peut induire, et veiller à disposer la lame pour qu'elle ne vienne pas trop facilement vous embrocher le ventre !
Entretien et durée de vie
Il est rare que l'on ait
besoin d'aiguiser un piolet de randonnée. Il n'est pas
nécessaire qu'il soit très pointu pour être
efficace en "position d'arrêt". Trop aiguisé
cela augmente le risque de blessures.
Le problème est
différent lorsqu'on veut pratiquer le piolet cascade (piolet
traction exclusivement) : voir chapitre "escalade sur glace".
Préférer un aiguisage à la main (lime) pour
ne pas chauffer le métal.
Les lames ne sont général
pas inoxydables. L'humidité les fait rouiller...pour limiter
cela, lors du stockage, retirer les embouts de protection qui
pourraient conserver l'humidité. Enduire l'acier avec un peu
d'huile et en général cela suffit. Un piolet de
randonnée s'use peu et peut durer toute une vie sauf choc
anormal.
Attention : collages et traitements thermiques peuvent
être détruits -sans que cela se voit- si vous laissez un
piolet trop près d'un feu ou d'un poêle.
06/07/2009
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