Alpinismes.free.fr - - - - - - Texte et illustrations Yves Saliba (tous droits réservés) . Dernière mise à jour le 08/08/2013 à 11:03

La ramasse...les ramasses

Terrain glissant : L'appui-ramasse

Introduction

Les différentes formes de ramasse (surtout l'appui-ramasse) sont des techniques fondamentales de l'alpinisme et de la randonnée qui, bien pratiquées, apportent un gain considérable en terme d'efficacité et de sécurité.

    Elles peuvent s'utiliser sur tous les terrains (pierriers, herbe, terre, neige), que ce soit à pied, en crampons, à raquettes ou à skis (rando, fond, patinettes,surf ou "snowboard").
    En voici une présentation :

Vocabulaire : les ramasses !

Dans le langage courant de l'alpinisme le même terme "ramasse" ou "faire de la ramasse" est utilisé pour désigner 2 techniques certes complémentaires mais indépendantes. Trop de personnes croyant savoir font la confusion et en tirent des conclusions erronées.
Pour clarifier le débat nous conviendrons d'utiliser les dénominations suivantes
-Appui-ramasse
-Glisse sur chaussures

L'appui-ramasse

C'est une technique qui consiste à prendre appui en s'arc-boutant sur un bâton (ou un piolet) :
-une main soutien un bout
-une main prend appui entre le milieu et l'autre bout
-l'autre extrémité appuie ou frotte sur le sol.
L'appui-ramasse se distingue de l'appui-canne (appui sur le bâton tenu d'une seule main).
Il s'applique en de nombreuses circonstances : montée, traversée, descente et sur toutes sortes de terrain neige, herbe, ou même rocher.

Autres noms : triple-appui ou ARC (parce que les bâtons pris en 3 points comme un arc et aussi en référence à Archimèdes qui, avec un levier et un point d'appui, se proposait de soulever le monde !)

La glisse-sur-chaussures

Souvent appelée "descente en ramasse"
Le but de cette technique -exclusivement de descente- est de glisser sur les semelles des chaussures comme sur des skis miniatures.
L'équilibre est évidement instable et la glisse médiocre mais cette technique est un moyen amusant et rapide pour descendre des névés (ou des éboulis fins).
La glisse-sur-chaussures est la plupart du temps pratiquée associée à un appui-ramasse qui en améliore considérablement la stabilité et le contrôle.

La ramasse en tant que glisse-sur-chaussure ne doit donc pas être confondue avec la ramasse en tant que technique d'appui.




L'appui-ramasse

Peut se pratiquer avec un piolet, avec un bâton quelconque ou une paire de bâtons.
Nous décrivons ici un appui-ramasse en traversée.

Méthode avec bâton(s)

Préhension

Si on a 2 bâtons, les prendre ensemble (1 seul bâton est trop fragile). (Pour simplifier nous disons ici comme si nous n'en avions qu'un)
Prendre le bâton
-avec la main aval en supination = doigts sous la poignée, pouce dessus (donc orienté vers le haut de la poignée)
-avec la main amont en pronation = posée sur le corps du bâton pouce vers la poignée
Les deux mains sont donc disposées pouces vers le haut de la poignée.
Le bras aval est fléchi
le bras amont est presque tendu et prend les bâtons le plus près possible de la pique afin :
-d'économiser la force musculaire
-d'appliquer un maximum de force sur la pique
-de faire subir au bâton une moindre contrainte de flexion
(Pour les scientifiques : La notion de science physique mise en oeuvre ici est celle de "moment d'une force")
Cette nécessaire position de la main amont entraine une contrainte qui nécessite un peu d'entrainement. C'est pour cela qu'il est plus confortable de pratiquer la ramasse sur une pente raide que sur faible pente.

Action statique

Tenir le bâton incliné entre l'horizontale et la perpendiculaire au sol.
Le poids du corps est déporté vers l'amont. Pour donner un ordre de grandeur :
2/3 du poids est porté sur les 2 pieds
1/3 du poids est porté sur le bras amont (qui le transmet au bâton)

Stabilité

Les 2 pieds + la pique du bâton constituent un "polygone de sustentation" beaucoup plus vaste que si l'on ne dispose que des pieds. On est donc très stable.
("Stable" signifie qu'il faudrait subir une force et un déplacement important pour être basculé).

Freinage

La force exercée par la pique sur le sol crée un ancrage ou un frottement qui contribue de façon importante à empêcher de glisser.
Dans certaines conditions, si les pieds n'ont plus guère d'effet (plaque de glace vive), cet ancrage peut même suffire à empêcher la personne de glisser. (pique plantée dans le sol)

Action dynamique

En situation de glissade qui peut être
-volontaire (pratique de la glisse-sur-chaussures, ou autres formes de ski)
-ou involontaire (accidentelle)
les pieds et la pique bougent mais restent maintenus suffisamment écartés : l'assiette est ainsi maitrisée. Notamment, on garanti ainsi de ne pas "tomber sur les fesses", et de garder les pieds vers le bas (prêt à encaisser d'éventuels chocs), tête en haut.

Applications

utilisable à la place du piolet-ancre(qui reste plus efficace) dans les pentes pas trop raides, pas trop dures.
glisse-sur-chaussures et ski
descente rapide de terrain scabreux
marche sur un chemin facile mais exposé (cas classique en montagne à vache)

...

Méthode avec piolet

Même principe qu'avec le bâton, mais
-la main aval tient le piolet par la tête (ou même par la panne), de manière à ce que la lame soit orientée à l'opposé du corps.
-la main amont tient le manche près de la pique, pouce vers la tête du piolet. Ne doit pas être trop près de la pique pour protéger la main des obstacles.
Le manche d'un piolet moderne étant assez court, cela cantonne l'appui-ramasse-avec-piolet à des pentes raides.
(les piolets trops courts (piolet cascade, piolet dit "de dépannage") ne sont pas utilisables)
La grande solidité de la pique permet aussi un ancrage fort.
En cas de chute, il faudra reprendre la tête correctement pour passer en position d'arrêt. Bien sûr, c'est une perte de temps, mais tenir le piolet dans l'autre sens serait dans ce cas trop dangereux pour la jambe amont (lame).

Principe

(Comparaison en tenue-canne et appui-ramasse lorsqu'on dispose de bâtons. Un piolet utilisé en ancre reste évidemment un moyen d'arrêt beaucoup plus efficace)

Caractéristiques de la tenue en canne(s)

(Il s'agit bien sûr de la manière de tenir un bâton avec une seule main et à peu près vertical)
L'appui-canne qui est habituellement la seule technique connue est rassurante parce que dans la limite de l'aire de stabilité(écartement des piques des bâtons), il n'y a aucune sensation d'instabilité.
Par contre, lorsqu'on franchi cette limite (glissade, faux pas...), l'instabilité est totale, il n'y a plus aucun contrôle, la chute est imparable
Il ne restera qu'à essayer de s'arrêter pendant la glissade qui suit la chute. (avec les mains dans les dragonnes cela risque d'être encore plus difficile).
De toute façon, lors de chaque pas, pendant qu'on déplace le bâton, il ne porte pas.
(L'appui-canne se défini comme un système à seuil ou "système catastrophique")

Caractéristiques de l'appui-ramasse

L'appui-ramasse est moins rassurant (quand on le découvre) car il exige une compensation permanente entre appui et soutènement pour assurer la stabilité.
Par contre, cela entraine plusieurs avantages décisifs :
-une sensibilité exacerbée qui permet de détecter précisément les variations d'état du terrain (on est moins pris au dépourvu)
-une disponibilité totale, car en cas de début de glissade on est déjà en position de contrôle
-un appui permanent : lorsque l'on se déplace, l'appui est glissant. La perte de contact avec le sol est minime.
-un rattrapage automatique : si un pied vient à glisser, on tend à se coucher sur le sol, du coup l'appui sur le bâton augmente, augmente le freinage et évite toute chute brusque (amortis). Cet effet est automatique (il ne dépend pas de l'entrainement).
-si la glissade ne peut être enrayée immédiatement, l'appui-ramasse procure en général un freinage plus puissant que la position-d'arrêt-avec-bâtons (bâton-pieu-pique)
-dans le cas (rare) où l'on chute franchement, on tient déjà les bâtons ensemble prêt à être utilisés en ancrage-piques pour la position d'arrêt avec bâtons.
-dans le cas où le terrain est peu exposé, on peut même négocier confortablement la situation en passant en ramasse dorsale.
Ces différences considérables devraient faire adopter systématiquement la tenue des bâtons en appui-ramasse dès que le terrain laisse entrevoir un risque de chute.
L'appui-ramasse peut se pratiquer "glissant" ou "posé"(sans racler le sol).
(L'appui-ramasse est un système auto-régulant ou auto-stable).



Frottement

Le frottement des piques sur le sol crée une abrasion mais absorbe aussi une partie de l'énergie gravitationnelle. Ce n'est pas négligeable. En pente raide j'estime que cela permet de soulager les jambes de près de 30% de l'effort de freinage.

La glisse-sur-chaussures

Son aspect ludique ne doit pas faire oublier qu'elle n'est pas qu'un jeu.
Il est bien évident qu'encore plus que dans les autres formes de ski on s'y expose à "la gamelle" : on est très instable, la moindre irrégularité, trou, cailloux, plaque de glace peut faire chuter. Cela demande entrainement et dextérité ainsi que discernement pour revenir à la marche chaque fois qu'il le faut.
Inversement, bien utilisée (conjointement à l'appui-ramasse), et quand les conditions s'y prêtent, elle est un moyen de descente sûr et qui économise de la fatigue. Elle peut être plus sûre que de marcher en refusant de glisser à chaque pas.

            Video de démonstration de descente en ramasse (glisse et appui) :

Méthode

Il est de très loin préférable de se mettre en appui-ramasse pour pratiquer la glisse sur chaussures. Donc commencer par apprendre l'appui-ramasse.
La technique ressemble à celle du ski : Prises de carres, dérapages, fente des jambes (pour la stabilité frontale).
On alternera la glisse ou la marche sur les carres ou les talons selon l'exposition, la raideur, la fatigue. Attention aux chute à cause de cailloux cachés, de plaques de glace ou sur des cailloux !
Appuyer la moitié de son poids sur le piolet (bâtons).
Pour ralentir, prendre des carres avec les pieds et transférer le poids du corps sur le piolet (bâton).
Se tenir prêt à encaisser un passage de glace ou de rocher affleurant sans changer de cap. Peu importe la vitesse si on garde l'équilibre. (Ne pas tenir la main trop près de la pique à cause des pierres éventuelles).
Glisser sur les chaussures peut se faire sur neige dure (mais pas gelée), sur éboulis fins, sur terre.

Une variante : dévaler plutôt que glisser.

Pour s'adapter au terrain, on peut glisser ou marcher, mais aussi "dévaler" : je nomme ainsi l'attitude consistant à marcher très vite en absorbant les irrégularités du terrain par la variabilités des enjambées. Les pieds marchent mais, avec l'appui-ramasse on gère plutôt une glisse globale qu'une marche.
Attention : cette manière de faire demande un entrainement, une conditions physique sérieuse et les dangers sont importants.

Réversibilité

Nous avons tous un côté privilégié, néanmoins à la ramasse il faut être ambidextre et changer de côté selon les besoins.
Le bâton ou le piolet utilisé en ramasse doit être placé du côté amont

Protection d'autrui et de la nature

En terrain autre que neige il convient de prendre en compte

La sécurité d'autrui

Dans nos déplacements nous risquons de provoque des chutes de pierres.
C'est vrai de la marche ordinaire et des bâtons cannes, mais c'est encore plus vrai lorsqu'on pratique l'appui-ramasse et la glisse-ramasse qui dérangent le sol.
Pensez aux autres s'il peut y avoir du monde dessous, et même à vous même (car quelques fois on dérange l'amont) : s'il y a lieu, revenez à une marche tranquille et pratiquez l'appui-ramasse posé.

La protection de la nature

Evitez de labourer sauvagement avec vos piques un par-terre de fleurs, ou une végétation fragile sur un talus.
Dans un tel cas, sauf si cela nuit à votre sécurité, s'il vous plait revenez à une marche+appui-ramasse posé.

Mise en garde

Les techniques de ramasse sont à ce jour (2009) ignorées ou même dénigrées. En conséquence si vous demandez des conseils sur ce sujet dans les clubs de montagne, vous serez souvent rabroués.
Il vous faudra faire un choix. J'espère que ce document vous permettra de le faire en meilleure connaissance de cause.



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