Alpinismes.free.fr - - - - - - Texte et illustrations Yves Saliba (tous droits réservés) . Dernière mise à jour le 08/08/2013 à 11:03
Terrains glissants : Utilisation des crampons
Ahhh, les crampons !
Dès
qu'il est question de terrain glissant la solution miracle est
invoquée : les crampons.
Avec des crampons, ça ne
glisse plus, plus de problème...
Ce n'est pas si simple....
car plus dure sera la chute.
Chausser des crampons est facile
mais, savoir les utiliser c'est essentiellement savoir se servir de
son piolet.
Les crampons doivent être utilisés à
bon escient et jamais sans piolet.
Historique
Les
crampons sont des outils apparus assez tard en alpinisme, même
si le principe était utilisé dès
l'antiquité.
Les premiers glaciers furent "conquis"
en taillant des marches à la hache (La
Grande Casse 1860).
Après les crampons 10 pointes et
peu rigides sont apparus les crampons actuels à 12 pointes (ou
plus) permettant le cramponnage frontal.
Matériels
Les
crampons actuels se caractérisent selon
-leur mode de
fixation : à lanières ou à verrou (dit
"automatiques"
-leur robustesse : crampons universels/c.
de dépannage (légers, fragiles)
-leurs
particularités de conformation (2 dent frontales ou 1 dent
frontale)
Les crampons à lanières peuvent se
fixer sur n'importe quelle chaussure (suffisamment rigide)
Les
crampons à verrous (dits "automatiques"), plus
pratiques, nécessitent que les chaussures aient des débords
avant et arrières suffisants.
-Les lanières :
celle enduites de caoutchouc néoprène posent moins de
problème avec le gel que celles en polyamide
-Les semelles
antibottage : apparues dans les années 90 et très
utiles.
-Les surbottes : poches étanches dans lesquelles on
enfile des chaussures avant de chausser les crampons. Protège
du mouillage sauf condensation.
-Les "pieuvres" ou
housses de transport.
Avantages et
inconvénients
+Les
crampons permettent marcher sur glace vive, verglas, neige très
dure sans glisser. Sans crampons ce type de terrain est inabordable
ou bien demande de tailler des marches et prendre de grandes
précautions ce qui n'est faisable que sur peu de
distance.
+Sur terrains moins durs, moins glissants la marche
en crampons donne une sensation de stabilité qui peut être
une aide
-mais cette stabilité peut être
illusoire.
-Les crampons peuvent être cause de blessure
ou de chute. En effet :
--on risque à chaque pas de
s'accrocher leurs pointes acérées dans les guêtres
ou dans les mollets de se blesser gravement ou simplement de
trébucher.
--le phénomène de "bottage"
(accumulation de neige sous les crampons) forme un "sabot"
de neige qui empêche toute accroche sur le sol : c'est pire que
sans crampons. Ce phénomène peut être limité
par les semelles antibottage et par la technique de débottage
(frappe sur le crampon).
-En cas de chute ou de glissade, il
ne faut pas tenter de se freiner avec les crampons car
ils provoquent alors un blocage brusque et une chute extrêmement
violente (effet catapulte) et/ou la fracture des jambes (les maléoles ne résistent pas à un tel choc).
La position d'arrêt avec crampons
nécessite donc de lever les pieds pour que les crampons ne
touchent pas le sol : cela demande un entrainement car c'est
contraire au réflexe naturel. On ne peut
donc compter que sur le freinage du piolet (piolet-charrue).
-les
crampons peuvent endommager la corde si on marche dessus
-les
crampons peuvent blesser les coéquipiers
-marcher en
crampons est plus fatiguant que sans
-descendre en crampons
est très dur pour les jambes (il n'y a aucun
amortissement).
-le chaussage des crampons prend du temps
(beaucoup moins avec les modèles "automatiques") ce
qui peut faire hésiter à les chausser alors qu'on en
aurait besoin (surtout pour un court passage).
-si on est en
terrain mixte (glace/rocher ou alternance de névé et de
terrain sec) il peut être rédhibitoire de
chausser/déchausser souvent et marcher en crampons sur
rocher n'est pas le plus sûr.
Crampons
sur quelles chaussures?
On a
tout vu depuis les "baskets" jusqu'aux chaussures de ski
!
-Il faut savoir que les crampons tiennent mal sur des chaussures
qui ne sont pas rigides. Les chaussures dites "semi-rigides"
sont un minimum. L'idéal étant la chaussure d'alpinisme
à semelle rigide.
-Les crampons sollicitent énormément
les chevilles et ce n'est guère supportable si l'on n'a pas
des chaussures qui tiennent suffisamment bien la cheville
-La
question de base est pourquoi met-on les crampons ? Pour ne pas
glisser! Or, le premier équipement à avoir en un tel
cas c'est de bonnes chaussures suffisamment rigides. Les crampons
sont en plus.
Choix ou association entre crampons et
autres outils (piolet, bâtons)
Bien
souvent les crampons sont utilisés pour masquer un manque de
savoir faire que ce soit pour utiliser ses chaussures ou son
piolet.
Etre en possession de crampons ne dispense pas de disposer
d'un piolet et de savoir s'en servir, bien au contraire. Les crampons
sont un moyen de progression pas un moyen d'assurage.
Si
les crampons sont utilisés là où ils sont
vraiment nécessaires c'est à dire sur pente raide,
glissante et dure, il faut avoir conscience qu'en cas de trébuchage,
sans piolet, on n'a "aucune chance".
Certains utilisent
des bâtons en cannes avec leur crampons : cela n'est
raisonnable que sur des pentes faibles ou peu glissantes où
les crampons sont de fait non nécessaires et utilisés
là comme une facilité.
Le pire, que l'on voit
malheureusement, est de marcher encordé avec des crampons
et sans piolet. En cas de chute d'un des membre de la cordée,
sans piolet à la main, les autres membres n'ont aucune chance
d'enrayer la catastrophe; ce sera l'horreur et la mort.
Il est
donc impératif lorsqu'on prend des crampons d'avoir aussi un
piolet.
Le piolet est indispensable, les crampons
sont un complément.
(Le
piolet se suffit à lui-même et est utilisable
instantanément alors que le chaussage laborieux des crampons
peut amener à des prises de risques
aberrantes)
Crampons or not crampons
?
La question se pose en 3
temps :
-suis capable de renoncer ?
dans le cas où je ne prends pas les crampons et rencontre des
conditions qui les nécessitent, suis-je prêt à
renoncer et faire demi-tour (sous réserve que cela soit
possible !) ?, sinon :
-pour quel type de course
doit-on emmener les crampons dans son sac?
S'il y a un glacier à
traverser emportez les toujours (même s'il y a beaucoup de
neige vous pouvez être obligé de descendre dans une
crevasse ou une rimaille).
Pour les autres cas, s'il
y de la neige un peu pentue, des névés ou des pentes
d'herbe raide prenez un piolet, puis réfléchissez... si
vous avez encore un doute prenez aussi les crampons. Si vous avez
systématiquement besoin des crampons pour vous rassurer alors
envisagez de réapprendre à vous servir du piolet (école
de neige ou de glace)
-pour quel type de terrain
doit-on chausser les crampons et à quel moment le
faire?
Commencez toujours par prendre votre piolet à la
main.
Le terrain devient dur, mais c'est un passage court, et vous
savez bien vous servir de votre piolet : taillez quelques marches.
Le
terrain devient dur et ça risque d'être long ou bien
vous ne maitrisez pas bien la taille de marches : chaussez vos
crampons AVANT d'être en difficulté, mais ne chaussez
pas les crampons "au cas où" si cela n'est pas
justifié.
Si vous ne maitrisez pas bien l'usage du
piolet, est-ce bien raisonnable de continuer même ou surtout
avec des crampons? Ne devriez-vous pas plutôt revenir une autre
fois après vous être exercé sérieusement à
l'usage du piolet ?
Cas
particulier du glacier :
si le glacier est enneigé (hiver), les crevasses sont
masquées, et on ne ressent pas le besoin de crampons car la
neige est molle. Le problème est que si l'on vient à
tomber dans une crevasse alors on se retrouvera confronté à
des parois en glace vive. Avoir des crampons aux pieds peut alors
être fort utile pour se sortir de ce mauvais pas.
Quant au
compagnon de cordée qui, resté en surface, retient la
chute : sans crampons sur neige, il pourra exécuter une
"position d'arrêt" plus efficace avec ses chaussures
et son piolet; avec crampons il risque le catapultage mais, après
arrêt, il pourra par contre manoeuvrer plus facilement pour
porter secours.
Conclusion : pour ce cas, je n'ai pas d'avis
définitif, désolé.
Mode
d'emploi
Préparation
Les
crampons doivent être réglés à l'avance
(quand on fait son sac) pour être adaptés aux chaussures
choisies.
(Improviser le réglage au dernier moment risque
de nous voir constater qu'il manque un outil ou bien qu'avec le froid
c'est très pénible)
La longueur du crampon doit être
réglée de manière à ce que la chaussure
entre en force dans les griffes du crampons : le crampon doit tenir
tout seul avant même que l'on ait fixé les lanières
ou verrous.
Les crampons devraient être suffisamment
aiguisés mais pas trop, cela dépend de l'usage visé
car les pointes acérées s'usent vite et sont causes de
blessures. Le besoin n'est pas le même pour faire une marche
peu pentue (marche sur glacier) ou pour faire de la cascade de
glace.
Précautions
Débottage
Le
phénomène de "bottage" (accumulation de neige
sous les crampons) peut avec certaines neiges collantes former un
"sabot" de neige qui empêche toute accroche sur le
sol. Pour limiter ce phénomène il est judicieux
-d'utiliser des "semelles antibottage" en caoutchouc
silicone qui empêche la neige d'adhérer sous le
crampon
-de débotter à intervalle régulier
(frapper sur le crampon avec le manche du piolet pour faire tomber le
bloc de neige. (cette opération est délicate, on est
sur un seul pied; si on a une dragonne de piolet attention à
ne pas l'accrocher)
-de surveiller les crampons de ses camarades
et de les avertir car on ne rend pas toujours compte que nos crampons
sont encombrés de neige.
Resserrage
Avec
des crampons à lanières, il faut prendre la précaution
de les resserrer à intervalle régulier, surtout en
début d'excursion. En effet, le matin à froid on
n'arrive souvent pas à les serrer convenablement et puis les
chaussures se déforment.
Inversement, un serrage excessif
peut par grand froid favoriser les gelures des
pieds
Utilisation
Comme
on le voit sur les schémas, la manière de marcher avec
des crampons est très différente de ce que l'on fait
sans crampons. En simplifiant, on peut même dire que c'est le
contraire. On voit bien là que cela nécessite un
entrainement.
Progression à
plat
Marcher en
posant le pied (=le crampon) à plat (ne pas dérouler le
pied).
Marcher en écartant assez les jambes pour éviter
de s'accrocher la guêtre ou le mollet avec les pointes au
passage.
Progression latérale
(traversée)
Lorsqu'on
marche sans
crampons sur terrain glissant on doit essayer de prendre des
carres.
Avec
des crampons, au contraire, on doit autant que possible piquer toutes
les dents du crampon dans le sol donc poser la semelle de la
chaussure parallèle au sol.
Cela implique de fléchir
la cheville selon l'inclinaison du terrain et cela peut être
difficile ou éprouvant lorsqu'on n'y est pas
entrainé.
Progression
frontale
La
progression frontale est plus "évidente" mais il
faut se souvenir qu'elle fatigue beaucoup les mollets. Il faut donc
la réserver pour les pentes raides où elle est la seule
solution.
En progression frontale on pique les 2 ou 4 pointes
avant de chaque crampon.
Il ne faut pas frapper trop fort, penser
que la glace n'est pas très solide et qu'il faut trouver un
équilibre entre profondeur de cramponnage et respect de la
cohésion de la glace.
Plus que jamais le crampon doit être
solidement fixé à la chaussure ! (c'est une cause
d'accident fréquente)
Progression
dorsale
Principalement adopté pour la descente
directe. Technique assez confortable et sûr. Les crampons sont
posés toutes dents au sol comme en "progression à
plat"
Manoeuvres
Il s'agit des opérations
de changement de côté, demi-tour etc...
Il faut s'y
entrainer spécifiquement surtout pour le cas où on est
encordé.
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