Alpinismes.free.fr - - - - - - Texte et illustrations Yves Saliba (tous droits réservés) . Dernière mise à jour le 08/08/2013 à 11:03

Quelles chaussures ?

Généralités

Les chaussures ne sont bien entendu pas réservées aux terrains glissants.

Pourquoi pas pieds nus ?

Marcher pieds nus pour une personne habituée à marcher en chaussures est une découverte.
Agréable : les pieds "respirent", on se sent sans contraintes, on retrouve la capacité à sentir le sol avec une extrême précision, et il y a même un plaisir sensuel à épouser le sol avec ses plantes de pieds, à sentir la chaleur, la texture, de l'herbe, de la mousse,du rocher, du sable, de la terre...
Si vous l'avez oublié, admirez un enfant gambader pieds nus...et faites de même.

Il est fort possible de marcher pieds nus en montagne et de faire ainsi de grandes choses. C'est ce que nous ont montré les peuples comme les sherpas, marchant pieds nu même dans la neige, ce qui pour la plupart d'entre-nous serait une torture ! (voir aussi Abebe Bikila vainqueur pieds nus du marathon Olympique)
Néanmoins, équiper les pieds avec des chaussures offre de grands avantages :
-la protection contre le froid
-la protection contre les contondances et les chocs
et bien d'autres.

Les fonctions d'une chaussure idéale

+protéger du froid, de l'humidité, de la saleté
mais
-ne pas empêcher le pied de "respirer" en laissant la transpiration s'évacuer
-ne pas tenir trop chaud

-protéger des contondances (cailloux pointus, épines, et détritus moderne (éclats de verre))
mais permettre de sentir le sol

-protéger des chocs et écrasements (se casser un orteil est terriblement douloureux !)

-maintenir les articulations (cheville) pour leur permettre de résister à une torsion
mais laisser assez de souplesse pour que la cheville puisse permettre l'adaptation du pied à la conformation du terrain.

-amortit les chocs sur le sol (marche, course, descente)
mais l'amorti ne doit pas entrainer un perte de sensibilité, ni gêner la prise d'appuis.







Chaussure et terrains glissants



L'adhérence

L'adhérence est la première idée qui vient quand on envisage d'aborder des terrains glissants.
Le rêve : avoir aux pieds des semelles comme les pattes des gecko qui grimpent allègrement aux murs et aux plafonds pour gober des insectes.
Nous n'en sommes pas là bien sûr.
Les matériaux les plus adhérents sont utilisés pour les semelles des chaussons d'escalade, c'est à dire pour grimper sur des terrains NON glissants.
Sur terrains glissants, la question n'est donc pas l'adhérence !



Le cramponnage

L'idée qui vient ensuite c'est celle de disposer de crampons qui piquent le sol (à la manière des crampons métalliques pour la glace) et qui là aussi vont faire que "ça ne glisse plus".
Cette idée est déjà plus judicieuse. Les semelles munies de reliefs permettent de répondre à une partie des situations de terrain glissant.
Jusqu'au milieu du 20° siècle on fabriquait des chaussures (brodequins) avec des semelles en cuir cloutées d'acier dont une variante nommée "ailes de mouche" pour les alpinistes.
L'apparition du caoutchouc permit de fabriquer des semelles moulées avec des reliefs dont la plus connue est la "Vibram". Vibram est une marque déposée du fabriquant "Vibramini" et qui est passée dans l'usage courant comme "Frigidaire" pour les réfrigérateurs.

La semelle de type "Vibram"
-d'une part adhère sur rocher par sa nature caoutchouteuse (molle et élastique)
-d'autre part, fait office de crampons qui pénètrent dans le sol de 2 manières : Lorsqu'un rocher est recouvert d'une fine couche glissante (terre, mousse) les crampons traversent cette couche pour venir prendre un appui plus ferme sur le rocher; lorsque le sol est mou (boue, neige), les crampons s'encastre dans le sol et assurent une relative cohésion avec ce sol.

La texture de la semelle résulte d'un compromis entre plusieurs qualités
-plus mou, elle adhère mieux sur sol sec (rocher)
-plus dur, elle offre une meilleure accroche et elle s'use moins vite.
Lorsqu'on choisi des chaussures dans un magasin (au chaud et au sec) on est souvent tenté par les texture molles qui adhèrent bien dans ces conditions confortables, mais pour tenir sur sol humide il vaut mieux des caoutchoucs assez durs.

Mais cette semelle apporte aussi un certaine rigidité en flexion qui va être mise à contribution pour la prise de carres

La prise de carres

L'expression fait penser au ski. Il se s'agit pas de ski ici, mais le principe est le même.
Lorsque le sol est mou et glissant, c'est en y enfonçant l'angle entre le bord de la semelle et la tige de la chaussure que l'on peut s'y accrocher.
Cela est favorisé par une semelle rigide, une tige rigide et un angle vif entre les deux (comme une carre de ski).
Cela nécessite aussi un entrainement, un force et une dextérité pour maintenir le pied en bonne position. Ceci est néanmoins beaucoup plus facile avec des chaussures dites "techniques" c'est à dire principalement rigides.
Une chaussure technique offre 3 axes de rigidité
    -la rigidité de la tige : renforce la cheville et permet d'exercer un couple plus puissant sur la semelle
    -la rigidité transversale et rigidité en torsion de la semelle
    -la rigidité longitudinale de la semelle ( on distingue les chaussures souples, semi-rigides (tout est rigide sauf l'avant du pied) et rigides)
(Une chaussure plus rigide permet une meilleure accroche mais est augmente la fatigue en marche facile et elle réduit la dextérité)

La prise de carre est LA technique principale pour se maintenir sur terrain glissant. Les crampons sont un complément utile.

Deux variantes de la prise de carre sont
-la prise de pointe : en montée frontale, on plante l'avant de la chaussure dans le sol et c'est l'angle avant de la chaussure qui permet l'accroche. Il est clair dans ce cas que les chaussures rigides facilitent cet exercice. Mais la montée frontale est rarement indispensable.
-la prise de talon : en descente dorsale, on plante les talons. Même les chaussures souples permettent cette technique.


Cas particuliers

Une situation dangereuse classique est la traversée de ruisseau par temps de gel. On croit que les rochers sont mouillés, mais ils sont quelques fois couverts de verglas : une fine pellicule de glace. Les meilleures semelles sont inefficaces sur le verglas. On ne peut adhérer ni cramponner, ni prendre de carres.
Si on dispose de crampon métalliques c'est le moment de les utiliser même si c'est pour quelques mètres.
2 autres stratégies :
-ne pas marcher sur les rochers, mais s'y assoir :les vêtements glissent moins que les chaussures et puis on risque de tomber de moins haut.
-se déchausser, et marcher en chaussettes sur le verglas : la grosse laine tient moins mal sur le verglas que le meilleur Vibram.



Choisir ses chaussures

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Ces quelques explications permettent de deviner qu'il n'existe pas de chaussure idéale ou universelle.
Il s'agit de choisir une paire de chaussures qui conviendra en général aux terrains que l'on envisage de parcourir.

Une chaussure très "technique"  (dite rigide) est plus chère, plus lourde, fatigue plus pour la marche facile mais elle permet une meilleure accroche, et renforce mieux la cheville. Sur neige dure elle permettra souvent une bonne maitrise même sans chausser les crampons en acier. Si on chausse les crampons, c'est ce type de chaussure qui est le mieux adapté.

Une chaussure souple est bon marché, légère mais dès que le terrain devient glissant (herbe, neige, terre) elle montre ses limites : on n'arrive pas à accrocher ses carres. Y adjoindre des crampons métalliques est un bricolage dangereux.

Entre les deux extrêmes des milliers de compromis sont commercialisés.
Un compromis intéressant est la chaussure dite semi-rigide : la semelle est rigide du talon au métatarse, mais l'avant reste souple. Si la semelle est de bonne qualité, on disposera d'un cramponage correct; on pourra prendre des carres latérales ou faire une prise de talon. La lacune sera la prise de pointe mais, comme nous l'avons vu, on peut souvent éviter cette manière de faire.
L'utilisation de crampons métalliques avec ce type de chaussures est raisonnable sur terrain peu pentu.


Autres explications sur les chaussures ...

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Le choix des chaussures doit prendre en compte des tas d'autres critères (confort, chaleur, étanchéité, etc...) mais cela fera l'objet d'un article plus général la question des "Terrains glissant" dont il est question ici.

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